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Le haut-potentiel

Le haut-potentiel est une notion qui s’est développée sur base du Quotient Intellectuel. Le test de Weschler est une évaluation de certaines caractéristiques mentales que sont l’intelligence logique, verbale, la vitesse de traitement et la mémoire de travail. Le test a été étalonné. Cela signifie qu’il s’agit ni plus ni moins que d’un classement. Il permet de positionner l’individu vis-à-vis de la société. Les personnes considérées à haut-potentiel, dont le score global au test dépasse 130, font donc parti des 2% les plus doués dans ces quatre caractéristiques.

Le Quotient Intellectuel n’étant que peu prédictif de la réussite dans la vie, cette étiquette n’aurait pas plus d’intérêt que cela si nous n’avions pas observé chez les personnes à haut-potentiel un mode de fonctionnement qui semblait qualitativement différent : hypersensibilité, arborescence de la pensée, cénesthésie, etc. Au-delà d’un certain effet de mode, l’engouement autour de l’étiquette HP a permis de mettre en lumière ces différentes caractéristiques même si celles-ci ne se limitent pas aux personnes à haut-potentiel. Il ne faut pas être HP pour être hypersensible. Il ne faut pas être hp pour souffrir de « trop penser ».

Je m’intéresse moins aux personnes à haut-potentiel qu’aux particularités qu’elles nous apprennent. La passation du test de QI n’est donc pour moi pas nécessaire pour débuter un accompagnement.

L’arborescence de la pensée, un mythe ?

L’arborescence, souvent abordée dans le fonctionnement HP, est une pensée qui semble suivre plusieurs fils simultanément. Est-ce réellement possible ? Les neurosciences ont répondu à cette question : non. On ne peut penser à plusieurs choses en même temps. L’intelligence ne génère donc pas une pensée arborescente, il s’agit du fonctionnement naturel de notre cerveau avec ses milliards d’interconnections. Pourtant, dans le vécu des personnes à haut potentiel, cette impression est forte.

En réalité, si la pensée consciente est un fil, notre inconscient – c’est-à-dire l’ensemble des traitements automatiques qui se réalisent sans notre attention – traite constamment une grande quantité d’informations en même temps. Le fonctionnement HP, par son mode de pensée très intuitif, est simplement plus proche de ces traitements inconscients. En pratique, il doit donc quand même apprendre à gérer cette intuition pour éviter que le fil de sa pensée consciente ne saute du coq à l’âne et à structurer la quantité d’informations générée par son esprit.

L’hypersensibilité

Les personnes dites « hypersensibles » ont une forte réactivité émotionnelle. Elles sont traversées régulièrement par des émotions impressionnantes pour elles-mêmes et pour leur entourage. Mais la force de cette vie affective n’est pas la partie la plus difficile à gérer. Tout le monde vit des émotions fortes à certains moments de sa vie. C’est une chose tout à fait naturelle.

La sensibilité définit également la capacité d’un instrument de mesure à réagir à d’infimes variations. L’hypersensibilité signifie donc que les éléments déclenchant les émotions peuvent être imperceptibles. Des informations quasi intuitives, un regard, une atmosphère, une incohérence dans un discours, et l’individu sent tout son corps exprimer avec force ce qui se passe. Ce type de situation est complexe à gérer car l’individu ne comprend pas forcément le déclencheur de ses réactions et l’entourage, aveugle à ce qui se passe, aura tendance à l’invalider. L’individu hypersensible risque alors de se méfier de son propre ressenti, c’est-à-dire de lui-même, et d’entrer dans des mécaniques d’angoisse basées sur une tentative souvent infructueuse de dissociation de ses puissantes émotions.

La cénesthésie

La cénesthésie est une caractéristique de notre cerveau basée sur une forte connexion entre nos différents sens : la vision, l’auditif, le kinesthésique. C’est elle qui peut nous amener par exemple à associer un jour de la semaine à une couleur ou un son à une texture. La cénesthésie est très présente dans le milieu artistique.

En pratique, la cénesthésie signifie également que la pensée rationnelle n’est pas indépendante de notre ressenti. Une information que l’on ne « sent » pas ne pourra pas être comprise. Inversement, la compréhension confuse d’une notion sera vécue fortement au niveau kinesthésique.

La cénesthésie invite donc simplement à intégrer la gestion des émotions dans toutes les tâches à réaliser : apprentissage, organisation, communication.

Tous HP ?

La littérature décrivant le fonctionnement haut-potentiel, notamment les ouvrages traitant les aspects plus qualitatifs, s’accompagne souvent de la sensation d’être entouré de HP. Nous reconnaissons dans tel trait de caractère ou telle caractéristique un ami, un membre de sa famille, un collègue, etc. Pourtant, cela semble hautement improbable si l’on considère que les personnes à haut-potentiel correspondent à seulement 3% de la population.

Pour comprendre cet effet, il est important de laisser de côté l’étiquette « HP » pour s’intéresser à ce qu’elle met en lumière. Le fonctionnement haut-potentiel n’est qualitativement pas si différent du reste de la population. Il serait plutôt à percevoir comme un mode de fonctionnement très actuel. En effet, l’arborescence et l’hypersensibilité semble devenir des incontournables de notre monde. Internet est un outil fonctionnant de manière arborescente : une information nous mène rapidement à une dizaine d’autres qui, à leur tour, nous mènent à de nouvelles pages. La sensibilité émotionnelle, quant à elle, a pénétré la réalité de terrain de nombreuses institutions : école, entreprise, milieu médical, social, etc. Partout, les émotions semblent plus fortes et plus présentes que jamais.

Le fonctionnement haut-potentiel d’aujourd’hui est la norme de l’avenir : un esprit massivement interconnecté fonctionnant comme un tout.